Hausse d’impôts ou modulation des allocations familiales : le choix du gouvernement sera dévoilé ce lundi 3 juin 2013.
[Vous devez être inscrit et connecté pour voir cette image]C’est le premier coup de rabot effectué par François Hollande sur la protection sociale. Et « le début des difficultés de l’an II du quinquennat », glisse un proche du président, insistant surtout sur le chantier des retraites. Jean-Marc Ayrault doit annoncer aujourd’hui, devant le Haut Conseil de la famille, la solution choisie par l’exécutif pour réformer la politique familiale. Modulation des allocations familiales pour les ménages les plus riches ou plafonnement accru du quotient familial ? Le chef de l’Etat et le Premier ministre devaient trancher hier soir. Officiellement, les deux versions du dossier de presse étaient prêtes ; elles n’attendaient qu’un feu vert pour savoir laquelle serait envoyée à l’imprimerie. Jusqu’à très récemment, une modulation des « allocs » semblait tenir la corde. « Que les plus hauts revenus aient les mêmes allocations, non ! Ça sera revu », avait lui-même affirmé fin mars François Hollande à la télévision. Mais depuis quelques jours, l’exécutif donnait, en privé et jusqu’au sommet de l’Etat, le sentiment d’avoir changé son fusil d’épaule. « Tout pousse à utiliser le levier du quotient familial », glissait hier une source gouvernementale.
L’impact des deux mesures est assez proche. Dans le deux cas, ce sont les familles les plus aisées – environ 15 % d’entre elles – qui sont mises à contribution. Dans les deux cas, le rendement est proche de 1 milliard d’euros, même s’il s’agit dans un scénario d’une hausse des recettes et dans l’autre d’une baisse des dépenses. Il existe cependant une différence importante : les allocations n’étant versées qu’à partir du 2e enfant, leur modulation ne toucherait pas, par définition, les foyers avec un enfant. La réforme du quotient serait donc mieux répartie et moins pénalisante pour chaque foyer (voir la comparaison des deux scénarios ci-contre).
« Le front du refus »
Politiquement, le quotient familial paraît aujourd’hui comporter plus d’avantages. Le chef de l’Etat a pu vérifier, ces dernières semaines, la mobilisation des organisations familiales, sur fond de lutte contre le mariage pour tous. Elles défendent farouchement l’universalité des allocations (lire l’interview ci-contre). « Il ne faudrait pas laisser entendre que le gouvernement de gauche s’en prend par tous les bouts à la famille », soupire un lieutenant du président. Dans la majorité, on note que « le front du refus serait beaucoup plus large sur les allocations familiales ». Plusieurs ministres qui penchaient pour les allocations familiales ont changé d’avis, jugeant qu’il faut de la « sérénité ». Le quotient a certes l’inconvénient d’être une hausse d’impôt – le président promis qu’ils n’augmentait plus en 2014 – mais cette mécanique fiscale est souvent jugée plus indolore et plus facile à mettre en œuvre.
Ces arguments pèsent d’autant plus que ce n’est pas le seul coup de rabot annoncé aujourd’hui. Au total, l’exécutif vise plus de 2 milliards d’euros d’économies. L’allocation de base de la prestation d’accueil du jeune enfant pourrait être gelée et modulée en fonction des revenus. La prime de naissance et la réduction d’impôt au titre des frais de scolarité au collège et au lycée pourraient aussi être remises en question.
Reste que Jean-Marc Ayrault n’annoncera pas aujourd’hui que des économies. L’effort budgétaire consacré aux crèches sera renforcé : 100.000 nouvelles places seront ouvertes d’ici à la fin du quinquennat, ce qu’il ne manquera pas de faire valoir. Le budget annuel consacré par les caisses d’allocations familiales aux crèches, à l’aide sociale et aux centres de loisirs pour les enfants augmentera de 2 milliards d’euros d’ici à 2017, insistera le locataire de Matignon. A ces nouvelles places s’ajoutera le renforcement de l’accueil des moins de 3 ans dans les maternelles. Le Premier ministre devrait aussi confirmer la revalorisation de deux prestations accordées sous condition de ressources aux familles monoparentales (allocation de soutien familial) et nombreuses (complément familial), pour un coût d’environ 400 millions d’euros. Elles ciblent les familles modestes, une manière pour l’exécutif de faire valoir qu’il mène, malgré le plan d’économies, une politique de gauche.