Le 6 mai, François Hollande est élu avec 51,64 % des voix. Sur la promesse du changement « maintenant ». Un an plus tard, jamais président n'avait connu pires sondages. Revue de détails de ses principaux 60 engagements.
[Vous devez être inscrit et connecté pour voir cette image]Pour ce premier anniversaire, le président « normal » n'est pas à la fête, c'est le moins qu'on puisse dire. À peine interrompue par l'intervention au Mali - une décision unanimement saluée - la glissade de sa cote de confiance continue. Avec 74 % de mécontents de son action dans le dernier baromètre IFOP, le deuxième président socialiste de la Ve bat un record d'impopularité après douze mois d'action. Un effondrement étroitement lié à un autre record battu ces derniers jours, celui du nombre de chômeurs depuis 1997...
François Hollande est à la fois victime de la conjoncture économique - comme le fut Nicolas Sarkozy dès 2008 - mais aussi de certaines promesses imprudentes (du côté de Florange notamment) et d'un slogan de campagne qui lui revient aujourd'hui en boomerang. Difficile de demander aux Français du temps lorsqu'on leur a martelé pendant toute la campagne «le changement, c'est maintenant ».
Des changements, il y en a eu et nous en faisons ici un premier inventaire. Dans les écoles, avec des postes recréés là où le précédent quinquennat les avait sabrés ; dans la société, avec le vote du mariage pour tous, la semaine dernière ; dans les relations sociales, avec l'accord national interprofessionnel sur l'emploi (ANI) traduit dans la loi pour concilier sécurité pour le salarié et flexibilité pour l'employeur ; dans la politique fiscale, qui a supprimé le « bouclier » qui protégeait les plus gros revenus.
Mais les Français, inquiets pour leur avenir, ne retiennent que les cases vides dans le programme. Ils ne voient pas notamment de traduction de l'orientation de l'Europe vers la croissance claironnée par François Hollande à son arrivée. Ils réalisent qu'il ne suffit pas de nommer un ministre du Redressement productif, si tonitruant soit-il, pour empêcher les usines de fermer lorsqu'elles ne sont plus viables. Hier, l'hyperactivité de Nicolas Sarkozy avait fini par les exaspérer, aujourd'hui, ils se demandent si son successeur est taillé pour affronter une crise tout sauf « normale ».
HERVÉ FAVRE
1. L'EMPLOI, LE CHANTIER
« Je veux relancer la production, l'emploi et la croissance »
Engagement 1.TENU. « Je créerai une Banque publique d'investissement. À travers ses fonds régionaux, je permettrai aux régions, pivots de l'animation économique, de prendre des participations dans les entreprises stratégiques pour le développement local et la compétitivité de la France. »
La BPI a été créée en décembre. Son budget : 42 milliards.
Engagement 2. EN PARTIE. « Je mobiliserai l'épargne des Français en créant un livret d'épargne industrie dont le produit sera entièrement dédié au financement des PME et industries innovantes. Pour cela, je doublerai le plafond du livret développement durable, en le portant de 6 000 à 12 000€. » Le plafond a effectivement été doublé au 1er octobre dernier.
Celui du livret A est passé à 19 125, puis à 22 950€ au 1er janvier. Mais le livret d'épargne industrie n'a pas encore remplacé le livret développement durable. Le livret d'épargne industrie devrait, selon Matignon, contribuer à hauteur de 10 milliards d'euros au financement de la Banque publique d'investissement.
Engagement 3. EN PARTIE. « Je favoriserai la production et l'emploi en France. Je modulerai la fiscalité locale des entreprises en fonction des investissements réalisés. J'instaurerai, pour les entreprises qui délocalisent, un remboursement des aides publiques reçues.
» C'est le pacte de compétitivité, avec un crédit d'impôt, qui équivaut à une baisse de cotisations pour les entreprises, que l'État espère voir réinvesti dans l'emploi (150 000 postes).
C'est la loi sur la sécurisation de l'emploi, qui prévoit une surcotisation des contrats précaires et un renchérissement des licenciements pour les entreprises en bonne santé. Rien, en revanche, sur le remboursement des aides publiques pour les entreprises qui délocalisent.
« Je veux combattre le chômage qui frappe particulièrement les jeunes et les seniors »
Engagement 33. TENU. Le contrat de génération, « pour permettre l'embauche, en contrat à durée indéterminée, de jeunes, accompagnés par un salarié plus expérimenté ainsi maintenu dans l'emploi jusqu'à son départ à la retraite. » Objectif : favoriser l'embauche de 500 000 jeunes en cinq ans. La loi est entrée en vigueur le 18 mars.
Engagement 34. EN COURS. « Je créerai 150 000 emplois d'avenir, en priorité dans les quartiers populaires. Je reviendrai sur la défiscalisation et exonérations de cotisation sociale sur les heures supplémentaires, sauf pour les très petites entreprises.»
Lancés en novembre dernier, à la fin mars, à peine un peu plus de 20 000 emplois d'avenir ont été signés... alors que l'objectif est d'en conclure 100 000 d'ici la fin de l'année.
La fin de la défiscalisation des heures supplémentaires a été votée dès l'été 2012.
Engagement 35. TENU. «Je renforcerai les moyens de Pôle emploi . » Fin mars, le Premier ministre annonce l'embauche, en CDI, de 2 000 nouveaux agents d'ici la rentrée 2013.
LE PROBLÈME. Pour l'heure ces mesures ne portent guère de fruits alors que François Hollande garde l'objectif d'inverser la courbe pour la fin de l'année. En mars, le record du nombre de chômeurs a été tristement battu avec plus de 3,2 millions de demandeurs d'emploi. Le précédent record était de 3,1 millions de chômeurs en janvier 1997.
SOPHIE LEROY
2. LE DÉFICIT PUBLIC
Engagement 9. NON TENU. « Le déficit public sera réduit à 3 % du PIB (produit intérieur brut) en 2013. »
En déplacement à Dijon, en mars, le président a publiquement annoncé que le déficit passerait la barre des 3 % cette année.
AU PLACARD. «Je rétablirai l'équilibre budgétaire en fin de mandat. » La baisse du déficit est engagée. « En deux ans, nous aurons accompli un redressement structurel inédit , a justifié le président. Le déficit public s'élevait à plus de 5 % de la richesse nationale en 2011, 4,5 % fin 2012 et sans doute 3,7 % en 2013. »
Mais l'objectif d'équilibre en 2017 est abandonné : le programme de stabilité d'avril vise le 0,7 %.
Engagement 10. TENU. «Un coup d'arrêt sera porté à la procédure de révision générale des politiques publiques et à l'application mécanique du remplacement d'un fonctionnaire sur deux. »
3. L'ÉGALITÉ
Engagement 31. TENU. «J'ouvrirai le droit au mariage et à l'adoption aux couples homosexuels. »
Engagement 30. NON TENU. «Je lutterai contre le délit de faciès dans les contrôles d'identité. » Le projet de loi pour limiter les contrôles au faciès (avec récipissé à chaque contrôle) a été abandonné.
Engagement 32. EN PARTIE. «Je garantirai l'existence d'un volet handicap dans chaque loi » : effectif depuis septembre. « Et je renforcerai les sanctions en cas de non respect des 6 % de travailleurs handicapés dans les entreprises, services publics et collectivités. » Sera traité au cours d'une négociation interprofessionnelle.
Engagement 50. AU PLACARD. Le droit de vote, aux élections locales, des étrangers résidant légalement en France depuis cinq ans.
Engagement 25. TENU. «Je défendrai l'égalité de carrières et rémunérations entre hommes et femmes. Un ministère des Droits des femmes veillera à son application. » Le ministère a été créé, les dispositifs de contrôle renforcés, avec déjà de premières sanctions.
4. LA FISCALITÉ
NON TENU. «Pour un revenu au-dessus d'un million d'euros par an, le taux d'imposition devrait être de 75 %. »
L'imposition à 75 % a été retoquée par le Conseil constitutionnel et remplacée depuis par une taxe à 75 % payée par les entreprises sur les salaires dépassant le million d'euros.
Engagement 14. NON TENU. « Je veux engager une grande réforme fiscale. La contribution de chacun sera rendue plus équitable par une grande réforme permettant la fusion à terme de l'impôt sur le revenu et de la CSG. »
De l'avis de l'économiste Thomas Piketty, interviewé dans nos colonnes en janvier, on est, aujourd'hui, loin d'une grande réforme fiscale de fond qui «remettrait à plat notre modèle social et fiscal ». Un modèle fiscal « truffé d'exceptions, de niches » que chacun tente de préserver.
TENU. « Les revenus du capital seront imposés comme ceux du travail. » Les intérêts, dividendes, plus-values mobilières sont intégrés au calcul de l'impôt sur le revenu.
Engagement 15. EN PARTIE. «Je ferai contribuer les plus fortunés des Français à l'effort national en créant une tranche supplémentaire de 45 % pour les revenus supérieurs à 150 000 € par part. En outre, nul ne pourra tirer avantage des niches fiscales au-delà d'une somme de 10 000 € de diminution d'impôt par an. » La tranche supplémentaire, applicable sur les revenus 2012, a été votée en octobre et la loi de finances pour 2013 prévoit bien de plafonner l'avantage lié aux niches fiscales à 10 000 € (au lieu de 18 000 € et 4 % du revenu imposable) mais elle exclut de ce plafond les niches en outre-mer et dans le domaine de la culture.
Engagement 17. EN PARTIE. «Je reviendrai sur les allégements de l'impôt sur la fortune institués en 2011 par la droite, en relevant les taux d'imposition des plus gros patrimoines. » Certes, l'ISF a été alourdi (avec cinq tranches allant de 0,5 à 1,5 % ; contre deux, de 0,25 et 0,5 %) mais pas au niveau d'avant la réforme de 2011 (0,55 à 1,80 %). Le seuil de perception de l'ISF est maintenu à 1,31 million d'euros de patrimoine contre 800 000 € avant 2011.
NON TENU. «Nous n'avons pas l'intention d'augmenter la TVA comme vous l'aviez fait parce que c'est une mesure injuste », répond le Premier ministre J.-M. Ayrault à Nathalie Kosciusko-Morizet sur un plateau télé, en septembre 2012. Au 1er janvier 2014, les taux de TVA vont passer de 7 à 10 %, de 18,6 à 20 %. Seul le taux à 5,5 % baisse à 5 %.
A.-S. HACHE
« UNE RÉPUBLIQUE EXEMPLAIRE »
Engagement 47. EN PARTIE. « Je réformerai le statut pénal du chef de l'État. Je réduirai de 30 % la rémunération du président et des ministres. Les anciens présidents de la République ne siégeront plus au Conseil constitutionnel. » La réduction de salaires a été l'une des premières mesures prises. Mais pour le reste... Même à gauche, la révision du statut du chef de l'État divise.
Engagement 48. EN PARTIE. «Je ferai voter une loi sur le non-cumul des mandats »... « Et cette loi sera en application dès 2014 », promet-il lors des primaires socialistes. Finalement, celle-ci - elle doit être votée d'ici l'été - ne devrait pas être appliquée avant 2017.
Engagement 49. EN COURS. « Je porterai la durée d'inégibilité des élus pour faits de corruption à dix ans. » L'affaire Cahuzac oblige le président et le gouvernement à aller plus loin avec une loi sur la moralisation de la vie politique qui doit être votée avant l'été.
MAIS ENCORE...
POLITIQUE FAMILIALE
« J'augmenterai de 25 % l'allocation de rentrée scolaire. » TENU. Comme la baisse du plafond du quotient familial pour les plus aisés. Une réforme des prestations familiales est prévue d'ici la fin de l'année.
RETRAITES
« Je ferai en sorte que ceux qui ont 60 ans et qui auront cotisé la totalitéde leurs annuités retrouvent le droit de partir à taux plein à cet âge. » TENU. En attendant la réforme à mener : durée de cotisation, pensions, etc.
AFGHANISTAN
« Il n'y aura plus de troupes françaises dans ce pays à la fin de l'année 2012. » TENU. Les troupes combattantes ont toutes quitté le pays.
Resteront, à l'été 2013, 400 militaires chargés de la formation et la coopération.
A SUIVRE...