A titre de sanction, la justice peut confisquer le véhicule, l’ordinateur, la maison d’un délinquant et l’attribuer aux forces de l’ordre qui en font la demande.
[Vous devez être inscrit et connecté pour voir cette image]La scène se déroule dans une rue de Saint-Aignan. Un automobiliste circule à faible allure quand soudain, une berline le dépasse et lui barre le passage. Des hommes en civil en surgissent et se saisissent du conducteur pour le menotter. Dans le même temps, une voiture de la gendarmerie se gare juste à côté pour montrer aux passants qu'il s'agit d'une opération de police judiciaire et non d'un enlèvement en pleine rue !
À la fois rapide, discrète et passe-partout, cette berline est devenue la propriété de la gendarmerie lorsque son propriétaire a été condamné définitivement par un tribunal pour violences aggravées et tentative de séquestration. « La justice a prononcé cette confiscation et a attribué ce véhicule à nos services dans le cadre de la procédure spécifique de la saisie des avoirs judiciaires, précise le colonel Jean-François Valynseele, commandant du groupement départemental de gendarmerie. Ce dispositif a été mis en place par une loi votée en 2007 qui permet de saisir les biens d'un délinquant quand ces biens ont servi à commettre un crime ou un délit ou quand ils ont été acquis de façon illégale. Le tribunal peut ensuite prononcer la confiscation définitive de ce bien et l'attribuer par exemple à la gendarmerie si nous en exprimons la demande. Cela concerne toutes les infractions passibles d'une peine supérieure à 1 an d'emprisonnement. »
Les automobilistes aussi
Il n'y pas que les voleurs qui s'exposent à ce genre de sanction. Les confiscations peuvent aussi être prononcées contre les automobilistes qui commettent des grands excès de vitesse, ceux qui conduisent sans permis, d'autres qui roulent en état d'ivresse ou après avoir consommé des stupéfiants. Le week-end dernier, un motard et un automobiliste pris en faute ont ainsi dû laisser leur véhicule aux gendarmes en attendant la décision du tribunal. Attention, une saisie ne débouche pas forcément sur une confiscation, mais la moto ou la voiture peuvent rester immobilisées plusieurs semaines. Le tribunal prononce des confiscations en fonction des circonstances et des antécédents judiciaires, par exemple dans les cas de récidive.
« Cette procédure était assez peu utilisée, ajoute le colonel Valynseele, en accord avec le parquet, nous y avons de plus en plus recours depuis deux ans. Ces confiscations ont une forte portée sur les délinquants d'habitude qui ne craignent pas l'incarcération et encore moins les peines d'emprisonnement avec sursis. C'est quand on touche au porte-monnaie que la sanction est vraiment douloureuse ! »
le chiffre
166.605
C'est en euros le montant des saisies réalisées par le groupement de gendarmerie depuis 2011. « Cela représente 15 voitures, une quinzaine d'ordinateurs, de nombreux disques durs… », détaille le lieutenant Francis Dumonteil, qui dirige la brigade départementale de renseignements et d'investigations judiciaires (BDRIJ). Sur ces 15 voitures, 5 ont déjà été définitivement attribuées au groupement départemental. « Ces véhicules ont été réimmatriculés, ils nous sont utiles pour effectuer des surveillances, des filatures. Ces voitures banalisées ne sont pas aisément repérables. » Quant aux ordinateurs et autres disques durs, ils sont dans la plupart des cas saisis dans des affaires de pédopornographie.
La loi permet de saisir tout type de biens, y compris une maison si le cas se présente un jour. « Cela donne un bon coup de pouce à nos services, commente le colonel Valynseele, parmi ces voitures, il y avait une puissante Audi et une grosse Mercedes qui ont été proposées respectivement à la section de recherches d'Orléans qui a besoin de véhicules de ce type pour les longues filatures, et au GIGN qui les utilise dans sa traque des Go Fast. »
Les voitures saisies dans le cadre de trafic de stupéfiants sont revendues par les Domaines afin de financer les actions de la Mission interministérielle de lutte contre la drogue et la toxicomanie (MILDT).